Par Marie BLANDIN, Avocate collaboratrice
Le 19/10/2023
Dans un arrêt récent de la Cour de cassation en date du 6 juillet 2023 (Civ. 3e, 6 juill. 2023, FS-B, n° 21-15.239), la question de la vérification de la date de remise de la garantie de paiement au sous-traitant par le maître d’ouvrage a été une nouvelle fois examinée, permettant de clarifier l’obligation du maître d’ouvrage en matière de sous-traitance.
La loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 énonce l’obligation du maître d’ouvrage de vérifier certains aspects des contrats de sous-traitance. Cependant, selon l’arrêt commenté, cette obligation ne s’étend pas au contrôle de la date précise à laquelle la garantie de paiement a été délivrée, que ce soit avant ou simultanément à la signature du contrat de sous-traitance.
En effet, l’affaire traitée dans cet arrêt concerne un maître d’ouvrage, qui avait confié des marchés de construction à un entrepreneur principal, lequel avait ensuite sous-traité une partie des travaux.
Lorsque le sous-traitant a fait l’objet d’une procédure collective, il a invoqué la nullité des contrats de sous-traitance en raison de la délivrance tardive de la garantie de paiement, qui n’avait pas été remise avant ou conjointement à la conclusion du contrat de sous-traitance.
La question soulevée dans cette affaire était donc de savoir si le maître d’ouvrage devait s’assurer que la garantie de paiement avait été remise en temps utile, c’est-à-dire avant ou lors de la conclusion du contrat de sous-traitance, conformément à l’article 14-1 de la loi de 1975.
En l’occurrence, la Cour de cassation a confirmé sa jurisprudence établie, selon laquelle, dès lors que le maître d’ouvrage a connaissance de la présence d’un sous-traitant sur le chantier, il doit mettre en demeure l’entrepreneur principal de présenter ses conditions de paiement et de fournir une caution personnelle et solidaire si nécessaire, conformément audit article 14-1 de la loi de 1975.
Aux termes de cet arrêt, la Cour souligne que tant que le maître d’ouvrage s’assure que la caution est remise au bénéfice du sous-traitant à la date à laquelle il constate l’existence du contrat de sous-traitance, il remplit ses obligations en vertu de l’article 14-1, et ce, quelle que soit la date précise de remise de la garantie de paiement.
Ainsi, l’argument de la nullité du contrat de sous-traitance en raison de la tardiveté de la garantie de paiement a été rejeté !
Cet arrêt de la Cour de cassation a donc une incidence importante sur la manière dont les maîtres d’ouvrage doivent gérer leurs obligations en matière de sous-traitance, en confirmant une approche restrictive de l’article 14-1 de la loi de 1975, et laissant aux maîtres d’ouvrage une certaine marge de manœuvre dans le processus de vérification de la sous-traitance, tout en maintenant la protection du sous-traitant.