Par Sophie IMBAULT, Avocate associée
Le 18/09/2023
L’acquisition de parts sociales ou actions au capital de sociétés d’HLM par les communes ne sont pas au nombre des compétences qui, en matière de politique locale de l’habitat, ont été transférées : des confirmations rassurantes.
Aux termes d’un jugement en date du 8 juin 2023 (TA de Melun, 8 juin 2023, n° 2010226), le tribunal administratif de Melun a confirmé, s’il en était besoin, que les communes membres d’un établissement public de territoire (EPT) compétent en matière de politique locale de l’habitat, demeurent compétentes pour acquérir des parts sociales ou actions au capital de sociétés d’HLM, conformément à l’article L. 431-4 du code de la construction et de l’habitation (CCH).
En effet, depuis le 1er janvier 2017, un certain nombre des anciennes compétences communales en matière, en particulier, de politique locale de l’habitat, a été transféré par les articles L. 5219-1 et L. 5219-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) à la métropole du Grand Paris et aux EPT.
Pour autant, l’article L. 431-4 3° du CCH dispose toujours que les « communes » peuvent souscrire ou acquérir des actions de sociétés d’HLM, dans la limite de deux-tiers du capital social. Comme le relève le tribunal administratif de Melun, cette disposition n’a pas été modifiée par les lois successives qui ont restructuré l’environnement des organismes de logement social.
Saisi d’un moyen relatif à l’incompétence d’une commune pour acquérir deux-tiers des parts sociales d’une SCIC d’HLM, le tribunal administratif de Melun clarifie donc l’interprétation combinée des dispositions du CGCT relatives au transfert de compétences en matière de politique locale de l’habitat, et aux dispositions spécifiques du CCH permettant à une commune d’être actionnaire majoritaire d’une société d’HLM.
En dehors du territoire de la métropole du Grand Paris, une position comparable avait été retenue, peu de temps avant, par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble (TA Grenoble, 22 mai 2023, n° 2302222). Dans cette affaire il était considéré, notamment sur le fondement des dispositions spécifiques de l’article L. 431-4 du CCH, qu’il n’existe pas de doute sérieux quant à la légalité des délibérations relatives à une opération permettant à une ville de demeurer titulaire d’une action à l’issue de la transformation en SA d’HLM d’une ancienne SEM agréée, nonobstant le transfert de la compétence habitat à Grenoble-Alpes Métropole.
Ces solutions sont cohérentes et peuvent être complétées à plusieurs égards.
Une société d’HLM n’est pas une société d’économie mixte (SEM). Or, l’article L. 1525-3 1° du CGCT exclut expressément, par renvoi à l’article L. 431-4 du CCH, l’applicabilité du régime des SEM aux participations des collectivités au capital des sociétés d’HLM. Ceci exclut notamment l’applicabilité des articles L. 1521-1 et L. 1522-1 3° du CGCT, propre aux SEM, aux termes desquels les collectivités ne peuvent participer au capital d’une SEM que dans le cadre des compétences qui leur sont reconnues par la loi et dès lors que la réalisation de l’objet de ces sociétés concourt à l’exercice d’au moins une compétence de chacune des collectivités actionnaires.
Les sociétés d’HLM sont donc régies par des dispositions spéciales du CCH qui priment sur des dispositions générales du CGCT (specialia generalibus derogant).
Aussi, il peut être observé que dans le cadre de deux rapports de contrôle, l’agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) a eu à connaitre d’opérations ayant conduit à une prise de participation à hauteur de deux-tiers du capital d’une SCIC HLM par une commune. La régularité juridique de ces opérations, intervenues postérieurement au transfert de compétence en matière de politique locale de l’habitat, n’a aucunement été remise en cause à cette occasion (ANCOLS, rapport de contrôle n° 2018-087 relatif à la Coopérative HLM Boucle de Seine ; rapport de contrôle n° 2018-086 relatif à l’OPH de Gennevilliers).
Il résulte de tout ce qui précède qu’une commune demeure compétente pour souscrire ou acquérir jusqu’à deux-tiers des parts sociales ou action d’une société d’HLM, conformément à l’article L. 431-4 3° du CCH, nonobstant le transfert de compétence intervenu à l’issue des lois dites « NOTRe » et « MAPTAM ».
Cette confirmation rassurera certainement nombre de collectivités et organismes eu égard aux opérations récentes ou en cours dans le secteur HLM.